INSTALLATION MONUMENTALE
Une commande de l’Etat :
« Les aveux de la pierre »

L’Etat français par l’intermédiaire du Centre des Monuments Nationaux a offert un lieu exceptionnel à Pascal di Péri. Le lieu qu’il a investi fait maintenant parti des centres d’intérêts importants du Château d’Angers. Voir ci-dessous le dossier complet.
L'œuvre : concepts et symboles
« Vous êtes là au rez-de-chaussée de la Tour du moulin du Château d’Angers. Ce lieu fut une geôle. Jusqu’à 60 prisonniers devaient s’entasser ici. La mémoire de ce lieu est si dramatique, si envoûtante, qu’il m’a semblé que bien avant la création de cette installation, elle suintait déjà de ces murs.
En « archéologue » de cette mémoire précieuse, j’ai voulu « sonder l’âme de ces pierres » pour rendre un peu plus palpables l’écume de cette énergie et les convulsions narratives qui en émanaient. Soulevant le sol en son centre en un volcan aux vapeurs d’or, cette mémoire diaphane mais d’une absolue détermination, se délivre de la chape de l’oubli jusqu’à la fracasser. La libération allégorique de cette brume d’histoire évoquée par des méandres frénétiques, fait irradier dans une même nébuleuse, les affres de la souffrance et la survie de l’espoir. Elle conjure et rend hommage…
Trois ombres spectrales tels des esprits, émergent de ce magma fibreux en une danse macabre. La spirale de cette trinité en suspension, nous renvoie à l’histoire factuelle de cette prison ainsi qu’aux stigmates intemporels et universels liés au processus de l’enfermement.
Soixante mains sont projetées là, dans la lave de ces aveux en fusion. Qu’elles s’en délivrent où qu’elles s’y perdent, leur foisonnance symbolise tout autant la désolation des captifs, que l’outil de leur évasion spirituelle caractérisée par les graffitis qui émaillent les pierres de ces parois oppressantes.
Une voix envoûtante et un univers sonore venus des confins des temps tournent là inéluctablement. Ils témoignent de la déambulation circulaire des prisonniers : ronde perpétuelle des tourments de l’angoisse et des chimères du temps qui stagne… Evocation prégnante et paradoxale qui caractérise plus que tout, ce lieu.
Car, très longtemps, ici, le châtiment a broyé les êtres les entraînant vers la mort, alors que tout en haut de cette tour, à une époque, la meule du moulin elle aussi tournait, broyant la graine pour alimenter la vie dans la forteresse.
J’ai élaboré cette création en environ huit mois, principalement au travers d’une technique que j’ai développée et que je nomme « structure-nouage ».
Plus de trente kilomètres de fils la constitue. Le centre de cette installation est haut de 4m environ. C’est sur cette technique composée de fils de métal noués, que je base l’essentiel de mes recherches sur le thème de la nuit et du mystère onde/particule qui « énergise » le vide. L’enfermement étant la nuit du corps. »
L’œuvre est sonore.

Un texte ainsi que des sons participent à son univers émotionnel…
Le texte (écrit et dit par Pascal di Péri) :
Je suis la meule d’un moulin exposé aux vents ténébreux de l’histoire.
Je suis la pierre repentante.
Je suis la meule du temps qui écrase l’éternité des prisonniers.
Je suis le souffle d’un volcan dont les volutes transpercent les parois du passé.
Je suis la ronde inexorable du châtiment qui condamne chaque pas à la perpétuité.
Je suis l’éruption secrète d’une bouche au cratère trop longtemps asservi.
Je suis le sillon sans graine des flétrissures de la muraille.
Je suis la braise qui grave les confins rêvés de ses cendres.
Je suis le cercle vicié où suffoquent toutes les inspirations.
Je suis le murmure de l’outre temps où ruisselle une sueur expiatoire.
Je suis le pilon qui broie les germes fossilisés de l’espoir.
Je suis le magma incantatoire des soliloques de l’agonie.
Je suis le cœur de pierre dont la roue ne fait que moudre la poussière des jours stagnants.
Je suis la mémoire en fusion envahissant les vapeurs délétères de l’oubli.
Je suis la valse macabre dont les ondes engloutissent les larmes du silence.
Je suis la lave incandescente qui soulève les scories des siècles pétrifiés.
Je suis la spirale opaque dont les méandres n’échancrent que le néant.
Je suis le cambouis visqueux de la nuit qui suinte d’ombres filantes.
Je suis le carrousel de crépuscules aux tourments abscons.
Je suis le ferment d’aurores sans soleil qui embrase la moiteur des plaintes.
Je suis le cloaque des oubliettes et sa noria de moribonds en camisole de fer.
Je suis le frisson de métal précieux qui affleure des entrelacs de l’amnésie.
Je suis le concasseur des entrailles stériles de la survie.
Je suis le chuchotement de chimères aux fumerolles encore captives.
Je suis la trajectoire courbe de l’aliénation dont l’étau presse les vestiges de la raison.
Je suis l’angoisse de la main qui scarifie les voûtes amères de l’attente.
Je suis la vague de granit sans âme profanant la dignité des reclus.
Je suis la nébuleuse foisonnante d’où jaillissent des gerbes de confessions.
Je suis la meule du temps… Je suis l’aveu de la pierre…
Je suis la meule… Je suis l’aveu… Je suis l’aveu…